Le leader de demain devra combiner intelligence émotionnelle, relationnelle et artificielle. Un grand défi à relever très vite et qui convoque à la fois le monde de l’éducation et celui du management.
Les soft skills, des compétences clés
Les entreprises plébiscitent les soft skills quand on évoque l’avenir du management. Leur traduction est : « compétences douces », mais c’est bien la version anglaise qu’on emploie. Elles désignent, par opposition aux compétences « dures » ou techniques, les compétences personnelles et relationnelles. Elles renvoient au « savoir être » (Bellier, 2004), souvent négligé au profit du « savoir » et du « savoir-faire », « savoir-être ».
Un cas emblématique de cette nouvelle donne est la sélection de Thomas Pesquet par l’European Space Agency parmi 8500 candidats. Alors qu’il est diplômé de Sup Aéro et de l’Université McGill, il met en avant, dans ses différentes interviews, ses soft skills « savoir travailler en équipe, savoir communiquer, être facile à vivre, la confiance en soi et dans les autres … ».
Définir les soft skills.
Il existe des nomenclatures stables et reconnues des soft skills. Il est important de le rappeler pour éviter toutes confusions souvent entretenues sur le sujet
Un des référentiels les plus aboutis est celui du PROGRESS (European Union for Employment and Social Solidarity).
Il répartit les compétences en 5 clusters qui se déclinent en 19 compétences comme présenté dans le tableau suivant :
Tableau : Le référentiel des soft skills du PROGRESS.
(Source : European Union Programme for Employment and Social Solidarity, 2011).
Efficacité personnelle | – contrôle de soi – confiance en soi – adaptabilité – créativité – apprentissage tout au long de la vie. | |
Relations et service | – compréhension interpersonnelle – orientation client – coopération – communication | |
Impact et influence | – impact / influence – connaissance de l’organisation – leadership – développement des autres. | |
Orientation résultat | – orientation objectifs / efficacité – implication dans l’ordre, la qualité et la précision – sens de l’initiative / proactivité – organisation et planification – recherche et gestion de l’information – autonomie | |
Compétences cognitives | – pensée analytique – pensée conceptuelle |
Les soft skills attendues par le monde du travail
Une étude du journal Le Monde publiée le 11 Avril 2016 menée auprès de 309 recruteurs français, identifie le trio de tête suivant : l’adaptabilité (61%), la positivité (48%), la créativité (47%) et l’esprit d’équipe (42%). L’enquête Linkedin Recruiter Sentiment 2018, privilégie le travail en équipe et la collaboration (49%), les capacités de communication (46%) et la confiance en soi (43%). Pour les jeunes diplômés (étude du CEREQ de janvier 2016), les soft skills les mieux valorisées sont la persévérance, l’estime de soi, la prise de risque et la communication.
La question qui se pose ensuite est le développement de ces soft skills, car elles ne s’enseignent pas. Elles exigent des modes d’acquisition spécifiques qui se fondent sur la mobilisation d’expériences personnelles et professionnelles, et qui impliquent de l’interdisciplinarité et un apprentissage dans la durée.
Comme corollaire du développement vient l’évaluation. Là encore, on en est plus au stade des propositions, des essais-erreurs que des démarches méthodologiques robustes.
L’évolution des emplois avec le développement de l’Intelligence Artificielle
La montée en puissance de l’Intelligence Artificielle, tant dans sa version « gestion des données » que dans sa proposition de « machines intelligentes » génère un grand remplacement dans de nombreux métiers et secteurs d’activités.
La grande question est donc de savoir piloter cette transformation en préparant les plus jeunes à de nouveaux métiers, et ceux déjà en emploi à leur évolution de carrière.
La conclusion est de parier sur les compétences que ne peuvent prendre en charge les machines, même les plus apprenantes. Si elles peuvent assurer avec beaucoup de fiabilité, d’efficacité et d’efficience les tâches liées aux « hard skills », on fait l’hypothèse qu’elles ne peuvent (du moins pour le moment) développer des soft skills. Elles sont ainsi dépourvues d’intelligence émotionnelle, c’est à dire la capacité à exprimer et décoder ses propres émotions ainsi que celles des autres.
Pour une extension du domaine de la compétence
Une question essentielle doit être posée avant de développer toute prospective en la matière : « Quelle vision de l’humanité se profile derrière le développement de compétences ? » Défendre les soft skills, c’est mettre l’Humain au centre du jeu. C’est vouloir que les hommes et les femmes soient en capacité de dialoguer entre eux mais aussi avec des machines, les « cobots » (collègues robots) qui se profilent à l’horizon.
Sachons tirer des leçons de la faillite de l’automatisation au cours des deux siècles précédents pour éviter les souffrances vécues par des générations de travailleurs.